“La réindustrialisation française” – Intervention de Philippe Miret à l’occasion des “Assises de l’Industrie”
A l’occasion des « Assises de l’Industrie », organisées par L’Usine Nouvelle, et dont le thème est « Exportation, relocalisation, made in France : la reconquête de l’industrie », Philippe Miret, Directeur Associé June Partners, est intervenu sur le sujet de la réindustrialisation française…
Généralement, lorsqu’on fait un état des lieux de l’industrie, il est important d’en analyser ses forces et ses faiblesses. Dans le cas présent, nous préférons nous attacher aux opportunités pour aborder le thème de la réindustrialisation
En effet, il y a deux opportunités qui maximisent l’attractivité des industries françaises. La première est la versatilité croissante de la demande, générant des besoins de flexibilité et de réactivité en boucle courte pour laquelle nos usines ne sont pas historiquement adaptées. La seconde est la présence de plus en plus forte des clients dans les usines à travers le Build-to-Order ou l’adaptation des produits aux usages réels.
Cela nous mène à évoquer la transformation des services dans le modèle B2B. Nous avons tous l’expérience de produits très sophistiqués dont nous utilisons seulement une toute petite partie des capacités. Le modèle de service accompagne les clients dans l’usage qu’il fait du produit afin de l’aider à en optimiser le potentiel.
Il s’agit donc de centrer l’offre de valeur sur le service – le produit devenant l’une des composantes de l’offre grâce à l’acquisition des données d’usage par la connectivité et la valeur créée chez le client.
La conséquence de cette nouvelle approche est une évolution du modèle industriel historique vers un nouveau modèle plus en adéquation avec ces offres.
Le modèle historique se fonde sur des produits robustes, un véritable savoir-faire industriel accompagnés d’un argumentaire de vente puissant.
Le nouveau modèle partira du client (ses « Pain points ») et s’appuiera sur une compréhension continue des usages, des produits personnalisés et un écosystème puissant pour apporter la solution attendue
L’impact industriel de cette nouvelle approche fait que l’usine de demain sera plus agile et connectée sur les usages, tout en étant une source de valeur pour les utilisateurs de ses produits.
Ce faisant, elle se transforme d’un centre de coût en une source d’avantage compétitif.
Deux exemples peuvent illustrer ces propos. Dans le cas d’un fabricant de semi-remorques, la situation initiale se résume à une pression continue sur les prix conduisant à l’appauvrissement de l’ensemble des acteurs de la profession et à un produit qui est perçu comme une commodité par les clients. L’analyse des usages montre que l’introduction d’asservissements sur les équipements mobiles permet d’augmenter drastiquement la productivité des tournées des transporteurs, source majeure de valeur. La démonstration de cette valeur permet alors de changer drastiquement le « pricing power » du fournisseur. De plus, la preuve peut alors être faite, en conditions réelles d’usage de la performance supérieure des produits par rapport à la concurrence.
Dans le cas d’un fabricant de pneumatiques, la connaissance des usages met en évidence que les clients n’utilisent que 66% du potentiel d’usure des produits en moyenne. L’accompagnement des clients dans leur usage au quotidien (vente au kilomètre) permet de réduire la consommation de produits et mieux valoriser le différentiel de performance produit. Elle ouvre aussi la porte au développement de produits mieux adaptés à chaque usage ainsi qu’à des offres différenciées (usure, économie de consommation ou encore résistance aux agressions externes)
Produire en France permet ainsi de disposer d’une base d’approvisionnement à proximité des marchés permettant de capitaliser rapidement sur la connaissance en temps réel des usages afin d’adapter en boucle courte l’offre faite aux clients et de protéger un avantage concurrentiel fondé sur la valeur créée chez les clients.