Les directions des entreprises sont sous pression avec le retour de l’inflation, par Nicolas Horaist, associé
Avec une inflation à 10,6% en Europe, 7,7% aux Etats Unis ou 3,6% au Japon à fin octobre 2022, le contexte est inédit sur les 30 dernières années. Et le phénomène n’est, à priori, pas prêt de s’arrêter si l’on en croit la formule du Président de la Banque Fédérale d’Allemagne, Karl Otto Pöhl, au début des années 1980 : “l’inflation est comme la pâte de dentifrice, une fois qu’elle est sortie, vous ne pouvez pas la faire rentrer “.
C’est l’ensemble du compte de résultat et des flux de trésorerie qui se trouvent déformés par ce contexte inédit. Nicolas Horaist, associé, analyse les conséquences de ce nouveau contexte sur les entreprises.
La marge brute est impactée par les hausses des coûts
Le premier impact des hausses de coûts se situe au niveau de la marge brute à travers les achats de matières premières, le coût de l’énergie et les coûts logistiques. Pour les directions, le travail passe à court terme par :
- Une bonne compréhension du phénomène (séparer les effets d’inflation des effets mix et volume),
- Une réflexion sur la performance des services achats,
- Des renégociations ciblées avec les fournisseurs clés de l’entreprise.
A moyen terme, les entreprises peuvent s’engager dans des logiques de collaboration avec leur chaîne de sous-traitance. Il est possible de bénéficier d’effets d’échelle qui peuvent être importants :
- En donnant une meilleure visibilité sur ses volumes,
- En comprenant mieux les problématiques des uns et des autres.
Les hausses des coûts se répercutent sur les prix de vente
Pour ce qui est de la répercussion des hausses de coûts sur les prix de vente, le potentiel de hausse n’est pas infini. Il se heurte à l’élasticité prix, c’est-à-dire, à la sensibilité des volumes à la variation de prix. L’enjeu est de maintenir les volumes, tout en augmentant les prix, afin de préserver la marge en valeur. Un autre moyen est d’adopter des stratégies de pricing plus élaborées afin d’augmenter la valeur perçue par le client avec :
- Une meilleure segmentation de l’offre,
- Des gammes renouvelées ou enrichies.
Mais ceci est compliqué dans un contexte de demande hésitante.
Il faut aussi trouver le discours et les arguments pour étayer les hausses de prix demandées aux clients. Et en la matière, les indices INSEE qui font généralement foi dans les discussions commerciales, ne traduisent pas toujours (ou alors imparfaitement) la réalité subie ou vécue par les entreprises. Ils peuvent être :
- Parasités par les mesures gouvernementales de soutien,
- Embarquer un décalage temporel,
- Ne pas refléter la complexité des opérations de l’entreprise.
Mais si les volumes baissent, une réflexion sur la structure de coûts fixes peut devenir nécessaire. D’autant que ces derniers sont eux-mêmes impactés par :
- L’inflation salariale,
- Les hausses de loyers,
- La diffusion de l’inflation par capillarité à tous les frais généraux des entreprises.
La trésorerie est impactée
La génération de trésorerie est impactée par divers éléments :
- La baisse du résultat opérationnel en valeur,
- Le fonds de roulement avec la revalorisation des stocks et des créances clients,
- Des hausses de coûts en tous genres (coûts de construction pour une nouvelle usine ou un nouvel entrepôt, coûts des matériaux, main-d’œuvre, etc.).
L’accès au crédit se complique
Le dernier impact vient plus tard et dépend de la stratégie de refinancement. Les banques centrales n’ont eu, d’autres choix, pour lutter contre l’inflation que de rehausser les taux directeurs. La BCE et la FED ont remonté leurs principaux taux directeurs à 2% et 3,75-4% respectivement début novembre (ils étaient à 0% il y a un an). Les coûts de refinancement augmentent donc, du fait de l’augmentation du taux sans risque. Mais le risque que fait porter l’inflation sur les entreprises fait aussi grimper les spreads de crédit, c’est-à-dire, les marges appliquées par les banques pour couvrir le risque de défaut. Ainsi, l’impact sur les taux de (re)financement est double et l’accès au crédit se complique.
Les directions en place dans les entreprises n’ont pas connu la période précédente de forte inflation. Elles doivent prendre la mesure de ce nouveau contexte. Et pour compliquer encore un peu la tâche, l’inflation n’arrive pas seule :
- La période actuelle est marquée par un dollar très fort,
- La nécessité de s’adapter aux conséquences du dérèglement climatique,
- Composer avec les attentes des nouvelles générations sur le marché du travail et une situation géopolitique incertaine.
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